Rencontre avec Dieu

 

 

 

 

Rencontre avec Dieu

 

François de Laubier

 

APHORISMES

 

PREFACE


 

Je me souviendrai toujours – de cette mémoire de l’âme qui est non seulement l’enregistrement, mais la résurrection du passé – de ce jour d’hiver où rentrant de voyage, j’appris brusquement la mort du Père de Laubier. Depuis des années, je m’attendais à cette mort. Ma surprise et ma douleur n’en furent pas moindres : d’où vient que la mort, qui est le seul événement absolument certain de l’ existence, est aussi celui devant lequel nous nous écrions comme devant l’imprévisible absolue : ce n’est pas possible !

La source de cette contradiction est dans l’amour. « Aimer un être c’est lui dire : » - toi, tu ne mourras pas ! » a écrit Gabriel Marcel. Un homme pétri d’amour et d’éternité comme le Père de Laubier ne semblait pas fait pour la mort. Mais le premier choc amorti, ma douleur ne concerna plus que moi-même – moins encore : la seule partie sensible de moi-même. Car je savais, au fond de mon être, que cette mort n’était qu’un accident, une apparence, un fait et non une vérité, que l’âme de mon ami avait rejoint son lieu et son centre et que l’absence physique allait se changer pour moi en présence intérieure permanente. Alors que tant d’hommes meurent comme des fruits verts arrachés à la branche par une absurde tempête, le Père de Laubier s’était détaché de ce monde tel un fruit mûr cédant à sa pesanteur interne...

Des mains pieuses et reconnaissantes ont recueilli ses notes éparses et les livrent à la méditation de ceux qui l’ont connu et aimé.

J’ai trop vécu dans l’intimité et le rayonnement du Père de Laubier pour être capable de porter un jugement objectif sur ces textes. L’homme, au sens plein du mot, c’est-à-dire le témoin et l’apôtre de ce qui dépasse l’homme, s’interpose trop fortement entre mon esprit et les mots que je lis. Il n’est pas une seule ligne qui ne ressuscite en moi un climat spirituel dont nulle parole ne saurait exprimer la chaleur et la lumière. Et c’est dans cet esprit qu’il faut lire ces pages : elles évoquent infiniment plus qu’elles ne traduisent.

Car le don d’écrire n’était qu’un des aspects extérieurs et secondaires de la personnalité du Père de Laubier. Un des aphorismes qu’on va lire s’applique par excellence à son auteur : « Pour connaître un homme, ce n’est pas son œuvre, qui est sa création, qu’il faut voir – mais lui-même. Car sa création reste irrémédiablement inférieure ». Ce n’est pas toujours vrai : il existe des auteurs qui sont incomparablement inférieurs à leur œuvre écrite; j’ai connu des génies qui avaient su exprimer les plus hautes réalités et dont le caractère et la conduite offraient, par leur médiocrité ou leur vanité, un contraste et un démenti scandaleux à la profondeur de leur message. De tels hommes sont de pur messagers, des « inspirés », au sens que les Grecs donnaient à ce mot, dont l’âme reste presque étrangère au contenu sacré du message. Le Père de Laubier – je l’ai déjà dit – était un témoin plus encore qu’un messager : sa personne même était un message ; les mots pour lui, étaient de purs signes qui se perdaient à peine éclos dans la réalité signifiée. Certains expriment plus qu’ils ne vivent : on sentait chez lui, par son attitude, par ses regards, par l’irradiation qui émanait de ses paroles, qu’il vivait plus qu’il n’exprimait – ou, du moins, que la formule verbale n’était que le plus humble de ses moyens d’expression.

« Il y a des gens écrit-il, qui abîment par leur présence toute joie qui voudrait s’exprimer ». J’ai songé en lisant cette phrase, à ces femmes honnêtes et pieuses dont parle Miguel de Unamuno, à ces Dalilas de la vertu qui coupent, non pas les cheveux, mais les ailes de leurs époux et de leur enfants... Le Père de Laubier possédait au plus haut degré le génie contraire : cet homme qui vivait depuis des années aux frontières de la mort et dont l’insuffisance physique restreignait si âprement l’activité extérieure, était la réfutation incarnée de la tristesse, « du mauvais oeil » et de tout ce qui ressemble de près ou de loin au complexe de frustration ou à la névrose d’échec. Tout en lui respirait la joie et l’éveillait chez les autres, non pas cette joie opaque et bornée, cet optimisme de bas niveau dont s’accompagne trop souvent l’équilibre biologique et la réussite temporelle, mais cette paix limpide des profondeurs qui naît de la participation à l’infini et à l’immuable et qu’on atteint qu’après avoir surmonté tous les orages terrestres. Son enthousiasme, son accueil, sa merveilleuse attention aux êtres, dilataient les âmes qui venaient à lui et délivraient leurs ailes captives.

J’ai prononcé le mot platonicien de participation. Aucun autre terme ne saurait exprimer avec plus de précision l’attitude fondamentale du Père de Laubier devant l’univers, les hommes et Dieu. Suivant le vœu du même Platon, il allait à la vérité de tout son âme. Son immense curiosité intellectuelle, loin d’être une pure gymnastique de l’esprit, avait pour unique but de découvrir de nouvelles raisons de croire et d’adorer : la lumière pour lui, était l’aliment de l’amour. Et c’est dans la mesure même de cette participation aux plus hautes sphères du réel qu’il se donnait tout entier, sans retour sur lui-même et sans la moindre trace de volonté de puissance, à ses disciples et à ses amis : un corps transparent ne retient pas la lumière, il s’efface pour mieux la communiquer aux autres. Tous ceux qui l’on approché ont éprouvé à son contact, cette contagion sacrée du mystère et du divin.

Les pages qu’on va lire doivent être méditées comme un appel limpide et brûlant à la transparence et à l’amour. Ces deux attributs de l’âme sont indissociables. Il a été dit qu’on ne peux pas aimer ce que l’on ne connaît pas. Il faut ajouter qu’on ne connaît vraiment que ce qu’on aime. La création est une forêt de symboles à travers lesquels transparaît Dieu. L’œil myope et impur s’arrête à l’apparence et fait l’univers opaque, le regard clair et aimant rend l’apparence transparente « Aimer un être c’est le rendre transparent » disait le poête. Et le Père de Laubier : « La seule réalité à cultiver dans l’homme, c’est son ouverture sur le monde et sa transparence à la vie ». Ou encore : «  On peut tout apprendre, mais on ne connaît que ce que l’on vit...  Toute connaissance vraie a une nouvelle dimension l’amour... L’homme endoctriné sait le texte, l’homme illuminé sait le sens.

La contemplation est un regard qui devient un amour... »

Ainsi pour l’âme pure, s’accomplit le cycle : après avoir connu et aimé Dieu en toute chose, elle voit et elle aime toute chose en Dieu. Et elle place le centre et le but de sa vie dans son rapport avec Dieu, dans cette parole créatrice par laquelle elle émerge du néant. Tout notre destin se résume dans cette phrase – la plus extraordinaire du Livre : « Si je dis je, c’est parce que quelqu’un m’a dit tu » - L’homme qui a compris cela ne peut plus à son tour, dire je, sans que ce mot soit un appel à ce Toi suprême qui l’a créé par amour – et sa solitude vaincue s’épanouit dans un dialogue éternel.

J’évoquerai, pour conclure, cette douloureuse confession du Père de Laubier : « Le drame a été qu’il m’a toujours fallu exprimer ce que j’aurai aimé vivre en silence ». Heureux frère prêcheur qui au lieu de s’enivrer de ses propres paroles, a vécu cette obligation comme une croix ! Mais nous, qui l’avons aimé, nous savons que sa parole n’a jamais trahi son silence et qu’elle aura mérité ainsi de nourrir, par delà la tombe, d’autres silences attentifs aux confidences intérieures de Dieu.


 

G. Thibon


 

 

« Tout ce qui monte,

converge »

Teilhard de Chardin


 

« Voici mon secret, il est

très simple. On ne voit

bien qu’avec le cœur,

l’ESSENTIEL est invisible

pour les yeux »

A. de ST-EXUPERY

 

 

 

 

 

« Dieu parle dans les deux livres : Nature - Écriture »-. La surdité est dans l’homme.

Quand un homme rayonne seul dans l’univers glacé de la comédie sociale il allume des univers vivants.

Rien n’est opaque, c’est nous, notre absence, qui rend notre univers aussi lourd qu’une chape de plomb.

La seule réalité à cultiver dans l’homme, c’est son ouverture sur le monde, et sa transparence à la vie.

La première chose à créer dans un être, c’est sa capacité d’ouverture, de disponibilité.

On a remplacé l’être, l’homme, avec toute sa valeur, par l’histoire.

L’homme croit en son savoir et en son pouvoir: il ne croit plus en lui.

Chaque homme doit suivre sa Route au travers de sa règle, de sa famille, et des évènements, dont la lecture lui révèlera le signe et la signification.

L’homme agité est celui qui n’a pas trouvé la maison où Dieu l’a créé où Il l’attend.

L’homme ne peut être que contemplé, si l’on veut le connaître. Aucun être, si miséreux soit-il n’échappe à cette loi.

Si les gens ont besoin de merveilleux, c’est qu’ils ont perdu la vision du miracle qu’est la vie.

Nous sommes en pointillés ce que le Christ est en plénitude.
Vasque, Il est la source.

Quand le moi n’est vécu que par le moi, ce dernier ressemble à une braise retirée du foyer originel. Il brûle, il fume, il meurt, et ses derniers feux sont tristes.

Il y a des gens qui abîment, par leur présence, toute joie qui voudrait s’exprimer.

Pour l’ignorant, tel il voit le croyant, tel il voit Dieu ; et Dieu vu ainsi, à moins d’une grâce particulière...

Il faut tout donner et faire glisser tout notre être dans celui des autres, afin de rester une pure capacité que le Seigneur peut remplir.

Tu es. Et il faut te prendre tel que tu es. Avec tout le tissu dont tu es créé tu as à révéler un trait encore inconnu du Visage. Tu as une mission à remplir, un témoignage, une respiration spirituelle, une lumière à donner.

Je ne comprends ta Parole que par ton être.

On ne reconnaît pas celui qui n’est pas attendu.

Un pauvre vous accueille, un riche vous reçoit.

Tout ce qui touche à la personne peut être montré, jamais expliqué.

Tout le monde possède un message et une façon de l’exprimer : l’aspect extérieur de sa personne c’est sa personnalité.

Si je dis « je », c’est que quelqu’un l’a dit « tu ». Je ne me reconnaîtrai qu’en quelqu’un.

Contemplation de la divinité à travers le Christ.

Dieu seul peut nous dégager de nos esclavages intérieurs, née de nous, la philosophie est donc une science impuissante à nous expliquer vraiment.

Le drame de l’humanisme athée est de regarder les étoiles dans les flaques de boue. Terre, rien que terre... Si nous devons toucher terre, c’est en vue d’un élan.

Que faut-il dire aux hommes pour qu’ils trouvent le Chemin ? La vérité sur eux ?- Aller jusqu’au bout : Dieu. Ne pas rester dans la « bouillasse » des demi-vérités.

Toute l’histoire de la pensée humaine témoigne de cet effort : passage du visible à l’invisible.
Chaque gestion, chaque parole vraie vient d’une source du cœur pour aller à la rencontre d’une personne qui accueille.

Ce qui rend l’illusion si tenace c’est qu’elle s’origine en nous, et pour la dissiper, il faut toucher à un point névralgique, à un point malade ou pourri. Là est le drame.

L’émotion est un de facteurs que l’on emploi quand on ne vit pas.

Une émotion non liquidée descend de tout son poids dans la conscience.
Poids d’un cadavre, il y pourrit et ses résurgences sont imprévisibles.

L’effort actuel de la culture est tel et les orientations sont si différentes, qu’il nous faudrait un génie pour faire une synthèse valable, sauvegardant tout ce qui mérite d’être gardé. Où est l’essentiel ?... indubitablement : Dieu, l’homme, les valeurs de gratuité.

On peut tout apprendre, on ne connaît que ce que l’on vit.

Tout connaissance vraie a une nouvelle dimension : l’amour.

La vrai philosophie possède plus d’ampleur que le ciel, plus de profondeur que l’espace, plus de substance que tout décor, y compris la nature.
La vrai philosophie touche à tout avec un mélange d’humilité et d’indiscrétion.

Participer à la pensée de quelqu’un, c’est déjà vivre sa vie.

L’intelligence vit de ce qu’elle prend ; l’âme de ce qu’elle reçoit.

Le notionnel deviendra réel si on le vivifie, ou si on le laisse vivifier par sa qualité.

L’homme endoctriné sait le texte, l’homme illuminé sait le sens.

On ne peut expliquer tout le réel.
Il nous englobe, et donc nous transcende.

Le symbole donne le sens de l’inexprimable et du réel à la fois.

Le spirituel au cœur du signe sensible : symbole, qui unit et respecte les deux dimensions.

« C’est le propre de notre vie moderne d’avoir divinisé le temps. Le temps c’est la matière qui s’écoule ; il n’a pas de valeur par lui-même ». Sa valeur c’est le point de contact avec l’éternité.

Pour chacun de nous le mot a une histoire ; sorti de l’expérience, il peut nourrir l’autre.

On cesse d’être maître en devenant « prof » dans la mesure où l’on ne vit plus ce que l’on doit enseigner.

Vieillir c’est transparaître, tout maquillage est une tricherie.

Seigneur vous bâtissez en face de nous des personnalités, elles sont l’expression de votre création, de votre Amour.

Les choses sont un langage.
Le monde subsiste à la manière d’une parole exprimée. Si le monde n’était pas l’expression de la parole de Dieu, les mots qui l’expriment divagueraient en lui comme des fantômes.

Le monde ne repose pas dans son propre mystère, il est vôtre.

Chaque créature n’ayant pas en elle sa raison d’existence, pour la connaître, il faut aller au delà de son expression, jusqu’à sa source.

L’univers est un lieu de théophanie. La nature affirme l’existence de Dieu et non sa nature, car ce qui est sorti de, est inférieur à.

Le monde est l’ombre de la présence de Dieu. Et c’est par égard pour notre liberté qu’il se tient in sacro silentio. Au travers de chaque créature c’est Dieu qui me regarde personnellement.

La matière prise comme absolu, c’est une puérilité de petit primaire.
Rien ne peut se transcender soi-même.

Ne méprisez rien car ce que vous mépriser deviendra le germe de la pourriture, qui pourrira ce qui est sain.

Une fois que Dieu dans sa souveraine liberté a décidé la création, celle-ci engendre une série d’obligation de sa part.

Ce qui est admirable dans la nature, c’est qu’elle ne se repose pas, et exprime en toute pureté sa source mystérieuse que l’on n’atteint jamais.

La finalité de l’art est d’exprimer dans le sensible, ce que l’on ferait dans l’invisible.

La période romane est sans ambiguïté, car l’homme renonce à lui-même en tant que fin. C’est chrétien.

Le péché des artistes est de vouloir dérober la couronne de la béatitude avant de la gagner.
S’ils la décrochent, elle n’est pas pour eux. Elle est en carton, ou faite de charbons ardents.

On ne comprendra bien la nature et tout le créé visible et invisible que si l’on connaît Dieu.

Pour connaître un homme, ce n’est pas son œuvre, qui est sa création, qu’il faut voir ; mais lui-même. Car sa création reste irrémédiablement inférieure. Ce qui est vrai de l’homme est infiniment (qualitativement) plus vrai en ce qui concerne Dieu.

Chercher le bonheur dans le futur, en méconnaissant Dieu, c’est risquer l’écrasement de la personne.

Dieu est une certitude et non une sécurité.

Quand Dieu est une absence, la condition humaine est un esclavage.

Qui veut être Dieu sans Dieu chute dans la matière.

Avoir le sens de Dieu, c’est avoir l’intuition même de l’Être, et sentir que Dieu est vivant.

Pour accueillir la Révélation de Dieu, il faut croire d’abord à son existence.

Nous suivons la trace de Dieu à partir de la limite des choses ; des choses qui ne sont pas Lui.

« Dieu ne se nie pas.
Il se déplace. »
Malheur à qui lui a donné son visage...

Recevoir une grâce, c’est prendre « acte » d’une présence plus spéciale de Dieu.

La liberté en Dieu s’appelle Grâce.

Dieu ne donne aucune grâce pour l’imagination.

« Dieu de toutes choses.
Même quand j’avance dans le vide je me heurte à Toi. »

Quiconque a pressenti la présence unique de Dieu, devient pèlerin de l’absolu.

Tout ce qui ne nous ramène pas au silence, nous tue.

Le silence naît d’une attention intériorisée, quand le regard et le cœur dépassent ce qui se voit.

Dieu ne fait confiance qu’aux silencieux.

Tout parle de Dieu, mais sa Parole est silence.

Le soleil et Dieu se posent partout.
L’Amour comme Dieu n’habite nulle part, étant infinis.

C’est le dernier sou qui achète Dieu.

Dès que l’on supprime Dieu, toute joie se fane.

Si l’on trouvait Dieu au bout d’un raisonnement, ce serait odieux.

Au fond de vous, au-delà de la vanité, du bruit, du respect humain, il y a une réalité sacrée à laquelle nous ne voulons pas toucher et qui nous semble tellement importante. Elle est une perle précieuse, toujours présente, vivante. Si cela n’existait, la vie serait sans étoiles, ni fondements. La vie fanerait.
Peut-on concevoir, imaginer un monde sans cette présence stable, et qu’au travers des évanescences, il reste une stabilité. Elle est une personne.

L’être que je connais, si limité soit-il, reçoit des dimensions infinies de mon propre esprit. Cet esprit lui-même appelle Dieu.

Si chaque créature est une fleur offerte à notre admiration et à notre amour, seule la qualité de notre regard en découvre la richesse.

Si une conversation, un mot, exprime un centre d’éternité, il n’encercle jamais.

Toute conversation éveille, réveille en nous ce qui s’y trouve et apporte quelquefois ce qui était attendu.
Jamais une conversation, fut-elle lumière, ne brise une porte.
Pas même celle du Christ.
La foi, ton attente, t’a sauvé.

Chaque parole que nous prononçons devrait sortir de l’Éternité, faire éclater la vie en son centre invisible.

Si une parole se meurt au bord d’une porte, c’est que sa pureté n’est pas suffisante.

Pour beaucoup de gens le langage n’est pas une expression d’être, mais faite du silence humain, au-delà duquel sourd la parole.

Tout être que se présente est une théophanie, un être mystérieux ou un être ordinaire, ou une chose, tout dépend de la qualité du regard.

La réalité chante, on la voit selon la qualité de son cœur et elle deviendra signe ou voile, apparence ou transparence.

Le cosmos devient reflet ou voile selon la qualité de notre cœur.

Pour comprendre le signe, la parole de quelqu’un, il faut vivre sa vie, lire dans la lumière qui vient de la face mystérieuse de celui que nous aimons.

Si nous lisons au travers de chaque être un signe qui contient, révèle une réalité, ce signe devient sacrement pour le chrétien.

Pour chacun, le « mot » a une histoire. La sienne propre, vitrail ou écran, selon la qualité de l’ouverture du cœur. Il peut nourrir l’autre ou l’empoisonner.

Voir un signe c’est une chose facile, en comprendre la signification dépend du niveau où nous mettons notre infini : qualité ou quantité.

Le signe est une théophanie.

Le contenu des mots est aussi mystérieux que son existence même.

Cet être a perdu son visage. Il est devenu anonyme, matière sans signification.
Son sens profond pourtant est de signifier. Il est devenu la proie de toutes les mystiques infra-humaines.

Le sens de la matière c’est sa transparence à la pensée créatrice qui la transfigure au travers de sa densité.

La route du Royaume de Dieu passe par l’espace minuscule que prend un homme sur terre. Si cet homme est Fils, le visage du Père transparaît et l’homme mauvais en a le cœur (sens biblique) remué ou fermé. L’homme de bonne volonté en est illuminé.

Chaque homme possède au fond de lui un message à dire. C’est le résultat d’un donné : sa personne qui doit révéler un trait encore inconnu de sa vie et de son option fondamentale où joue cette admirable....... gratuité entre Dieu et nous.
Dire Oui au oui de Dieu dans la ligne que Dieu marque.
C’est à nous, en confidence d’amour, à savoir la hiérarchie des valeurs que nous adopterons.

Extravagance d’un Dieu muet...
S’il existe, s’il crée, il ne peut que parler. Sinon, quelle comédie !

Être chrétien, c’est avant tout exister sur le mode de Dieu ; la Foi étant un savoir supérieur. L’Espérance, une certitude que tout concourt au bien de ceux que Dieu aime, la Charité une flamme qui éclaire ceux qui sont devant nous, et ceux qui sont loin, car dans leur nuit, ils peuvent voir notre amour.

Quand tout s’apaise, ce n’est pas en vue d’une jouissance, c’est pour l’attente d’un événement, d’une théophanie qui doit se faire selon la grâce et l’expression du Seigneur.

L’inquiétude n’est pas dans l’Avenir ; elle est dans la rencontre actuelle du Seigneur.

Méfiez-vous de votre imagination, surtout si vous sentez le vide, elle est à votre mesure. La Plénitude est à Sa mesure.

Créé à l’image de Dieu, seule l’expérience divine nous fera comprendre dans l’éblouissement de sa présence ce qu’est la Personne.

J’ai regardé cet homme, chaque parole, même chaque geste semble un tracé de lumière sortie de l’invisible pour nous convier à revenir au secret de nous-mêmes ; là git une source profonde.
Où est un secret ? Y a-t-il une source ? Y a-t-il une Route ?

« Etre libre, Aimer : tout est à vous, sauf vous, mais vous aux choix ».
Accueil ; toute attache à quoi que ce soit, fut-ce à un « caillou » nous empêche d’être disponible.

« Dieu est un oiseau de proie, Il déteste les cages ».

L’observance, le geste, c’est l’acte par lequel l’homme se tient devant Dieu.

Pour le technicien, la difficulté, l’obstacle vient de son orientation première et foncière. Elle est tournée vers l’idée, l’abstrait, vers ce qui se transforme.... C’est la matière infiniment transformable en tant que matière sans rapport avec la vie.

Je me révèle à toi par la nature Ma pensée, ma vie intime, par ton intelligence, et ta recherche silencieuse et ton repos.

Rien n’est plus inconfortable que la Foi et pourtant dès que l’on goûte sa lumière, l’humain devient une mauvaise histoire racontée dans un cabaret.

L’Éternité n’est pas un plus quantitatif, mais un autre qualitatif.

Vivre caché, en Dieu.
Donner sans regarder.

Vivre l’existence c’est à la fois s’intérioriser et accepter le déchirement.

Il est trop facile de faire du silence une vertu divine. C’est une vertu exquise à condition d’avoir su dire à son Ami, en son langage, les réalités brûlantes qui jaillissent de nos profondeurs.

Au fond de l’âme, il y a une face secrète qui est regardée par Dieu et dont la richesse est d’avoir conscience de ce regard.

Chaque créature pour l’âme purifiée devient un sacrement. Purification, ce n’est pas, ne pas avoir de fautes ; ceci est impossible ; mais c’est tendre vers Dieu. Dieu vu, aimé comme cet absolu qui est en nous, un au-delà qui est au dedans.

L’enfer c’est se désirer sans jamais s’atteindre. C’est refuser Dieu en le cherchant inexorablement.

Le plus long pèlerinage consiste à sortir de soi.

Sans cesse je me reçois de Votre main ; telle est ma vérité, et ma joie.

Enseignez-moi dans le silence de votre Présence à pénétrer en ce mystère.
Je suis. Je suis par Vous, devant Vous, pour Vous.

A chaque appel, et difficulté, ne pas oublier, que c’est Dieu qui demande : « Viens, j’ai quelque chose à te dire ».

La connaissance est un secret d’amour.
La morale n’est pas dans la lettre, mais dans l’amour.
La contemplation est un regard qui devient un amour.

Ce qui fait le vrai contemplatif c’est non seulement la qualité de son regard, mais que celui-ci soir une attente.
Il attend en cherchant. Il cherche en attendant la Vérité qui est une personne, et la Personne qui est pensée créatrice de Dieu. Il attend le signe mystérieux que seul, il comprendra. Signe banal : tout extérieur pour les autres, très intérieur pour lui, comme tout révélation. Il attend d’être mis au cœur de l’Amour qui est Création du monde et Rédemption du Christ. Il attend de voir, il cherche, il voit.

Ce n’est pas en tendant le cou que le Seigneur sera vu !... mais en attendant sa Grâce, sa Présence.
S’il ne vient pas, tu n’y es pour rien ; s’Il vient, si une lumière t’est donnée, ne la prend pas dans les mains mais ouvre ton cœur, et si c’est le moment de l’instruction, ne viens pas. Le silence du Seigneur est plus vrai que toute parole.

Le Christ s’est caché en nous afin de nous transfigurer.

Il ne force aucune porte. Il attend à l’extérieur. Et notre nuit peut devenir un appel.

Accepter jusqu’au bout sa vérité c’est-à-dire se savoir créature, et adhérer à ses limites comme aussi à sa source intérieure, c’est devenir Dieu par participation.

Le désert n’est pas un lieu d’isolement, mais un lieu de rencontre.

Il faut éviter toute violence pour écouter ce qui chante en nous.

Pour retrouver son âme d’enfant, il faut retrouver sa Foi : adhérer à la vérité qui vous dépasse, mais vous comble.

On ne la cherche pas.
On la trouve.
Car la lumière est chemin.

Quand le nuage s’étend, nous nions la lumière elle-même.

Seules l’intelligence et la foi peuvent faire attendre le Père et œuvrer avec amour.

La foi chrétienne a pour essence d’ouvrir une conscience aux mystères de Dieu, et non à un règne temporel.

La Foi n’est pas un cri, une émotion, mais une rencontre avec quelqu’un qui nous cherche.
Pourquoi cherche-t-il ? Ici joue toute la liberté de l’homme. C’est à cette hauteur qu’il faut se situer, sinon nous tombons dans l’imagination.

Par la foi on communie à Dieu.
Le dogme n’est qu’une indication intellectuelle d’un acte de communion.

Le Christ est signe suffisant pour montrer Dieu, mais Il est assez obscur pour que l’on passe à côté de lui sans le voir.

Les pèlerins d’Emmaüs n’ont pas reconnu le Christ leur parlant sur la route, mais accomplissant le geste de la fraction du pain.
En rompant ton pain, tu révèles le visage du Christ.

C’est la souffrance du Christ qui revêt la souffrance de l’homme d’une dignité divine.

Dans l’événement de Pâques, la résurrection est le premier acte glorieux du Christ, mais pas le dernier sur la terre.

Toute vie n’est communicable que par don gratuit. Toute démarche de l’Esprit à partir de la vie est communicable et d’une portée universelle.

Seigneur vous avez promis dans ce sang, que vous serez des nôtres jusqu’à la fin. Il me faut regarder la vie de votre Fils pour savoir jusqu’à quelle merveille sa vie est modèle.

En dehors de Lui, il n’y a que doute et recherche douloureuse. En Lui, il y a douloureuse, mais il y a au bout un Visage...

Apprenez-moi, Seigneur, les pas qui mènent au Mystère : signe, symbole, valeur, présence. Telle est la montée vraie de l’être vers la Lumière.

On reconnaît la liberté à la disponibilité d’un être pour écouter, agir, comprendre au travers de tout événement quotidien la voix du Seigneur.

Dès que la révélation divine franchit le seuil de notre demeure intérieure, une aube se lève. Les siècles sont pulvérisés. L’âme ramenée à un commencement absolu voit germer sa terre en un printemps éternel. Tout est vécu dans la splendeur de la présence d’un visage.

Note prière est d’avoir le cœur ouvert.

Dans la prière trop de gens se figurent que Dieu va se substituer à nous, et nous délivrer par une sorte de magie.
Ce serait indigne du Seigneur et de nous.
Il donne l’aide, mais Il veut que par une mystérieuse acceptation nous nous délivrions d’une emprise.

La vraie prière purifie le cœur, et rectifie la vision intérieure, car elle s’appuie sur la vérité de Dieu et nous entraîne loin de nous.

Ne rien abîmer de notre solitude.

La sainteté est la respiration du sacré.

La sainteté c’est se revêtir du Christ-Jésus, c’est laisser le Saint-Esprit sculpter notre visage intérieur ; cela veut dire qu’Il prenne vie de nos gestes.
Créés par Lui, nous ne nous réaliserons qu’en Lui.

La sainteté que le Seigneur est venu apporter, n’est pas de parer notre moi d’une couverture de vertus, aussi édifiantes soient-elles ; moins encore d’avoir une somme calculable de mérites ; être inscrit au livre de vie, c’est être présent et évoluer devant Sa face.

Cache-moi un moment ton visage pour que je puisse contempler ton âme.

Le puits de Jacob est partout, il est sur la place et dans le désert.

Nous avons besoin d’une loi, d’un rite, d’un geste. Sinon la source se changerait vite en fantaisie, et au moment de l’obscurité, à quoi se raccrocher ?

Toute âme a une face secrète qui regarde Dieu : qui appelle Dieu et la connaît dans son « instinct », au-delà de toute connaissance perceptible, car toute connaissance perceptible ne peut-être de Dieu.

Le drame a été qu’il m’a toujours fallu exprimer ce que j’aurais aimé vivre dans le silence.

Parler le langage intérieur de Dieu.
Parler et montrer la route de Dieu.
Tel est le travail du prêtre.
Pour cela, il lui faut un langage d’Etre.

Dire aux jeunes de ne pas s’affoler devant les affirmations solennelles d’un poète en acte d’exister, et qui confond souvent les enveloppes de la foi et la foi, dont le visage sur terre est le crucifié.

En ce monde occidental enfermé dans son propre progrès où le devenir n’aboutit à rien, qui criera à cette humanité écorchée la Parole qui la délivrera d’elle-même, lui rendra sa route. Tout est devenu abstrait, anonyme et dur. Les êtres ont perdu leur visage. Qui ? seul : le Saint.

Un cri de désespoir monte de l’homme. S’il veut être dans la ligne de sa propre pureté, qu’il écoute ce cri qui, dans l’éternelle nuit, a crié : « j’ai soif ».
Il n’y a qu’un Dieu vrai pour avoir soif de la bêtise humaine et en faire son lit de douleur.

« La qualité d’un être, ce n’est pas ce qu’il fait, mais ce qu’il recherche. »

À force de s’extérioriser, l’homme ne sait plus le chemin de son cœur, ni du cœur des êtres.

On échappe à ses limites, non par la conquête, mais par l’accueil.

Avoir une vie personnelle et ne pas toujours vivre en osmose. Etre, suppose vie. Etre, suppose certitude. Tant qu’elle est accrochée à un autre elle est fragile, seul l’Autre-Créateur nous permet d’aller au but.

Rares sont les gens qui sont à la fois riches et réceptifs. Pourquoi ?
Les gens riches éprouvent le besoin d’exprimer. Il faut un sens extraordinaire de silence et d’amour pour la richesse s’écoule.

Médire, c’est rayer nos victimes du monde des vivants.

Les hommes seront malheureux tant qu’ils chercheront le bonheur dans l’action, et dans l’action, l’efficacité ; seul l’invisible donne la joie.

Trop de prêtres vivent selon une théologie abstraite, et non selon une expérience religieuse. Le seigneur est ravalé au plan d’une morale.

Nos trahisons engendrent les péchés des autres.

Avant de vouloir convertir, il faut écouter; sentir le niveau où respire l’autre ; savoir résister à la tentation de faire « du bien » ; faire sentir la création.

Pour aider, il faut avant tout aimer car alors seulement la Parole étant Lumière de notre vie, elle joindra l’autre en son point accessible et fera naître la lumière qui n’est autre que Sa lumière.

Quand tu parles à quelqu’un, demande-lui son attention et non sa dépendance.

Écouter quelqu’un, c’est faire exhaler l’humble chant de son âme.

Nos ouvertures sont nos seules richesses.

La valeur de notre parole tient au témoignage de la vie qu’elle transmet.

Clarifier ses problèmes c’est déjà se mettre sur la route de la réponse.

Personne ne peut donner le grain qui lui a été confié ; on ne donne que l’épi fructifié.

Il n’est rien de plus urgent que de concilier le devoir d’apostolat et l’effacement de soi.
On est un serviteur et non une vedette.

Le son de notre amour pour Dieu s’exprime par nos gestes fraternels.

Le royaume n’est ni ici, ni là. Il est là où tu es. Là où tu réalises, où tu fais passer la vie du Seigneur, car tu es l’Église. Dans tes mains la Miséricorde passe ; dans tes yeux, le pardon ou la joie du Christ. Dans ton sourire, l’accueil ; et l’hospitalité si ton âme est trop lourde...

Il faut porter la vérité dans ses mains en tremblant, comme une flamme qui vous est confiée, et non comme un bien que l’on possède.

Seigneur, nous sommes d’humbles dépositaires, et que cela nous suffise.

Il est difficile de mettre seul, en place, ses idées, sans avoir en face l’interlocuteur qui oblige.

Si nous ne sommes pas capables de comprendre, d’entendre les autres...
notre surdité vient de ce que nous sommes pleins de nous-mêmes.

Bien des continents restent à évangéliser dans l’âme de tout Chrétien.

Rendre en fruits mûrs cette graine qui est en nous.

Que l’humble quotidien soit le chemin de votre gloire.

Le chrétien doit repenser sa Foi et cela non en doutant, mais en s’intériorisant à elle, en regardant d’où elle part, le sillon qu’elle fait, irriguant les routes de la vie, créant le chemin où il n’existe que nuit, pont entre vérités.

Il n’y a aucune forme de vie supérieure à une autre, car chaque créature est une avenue vierge, chaque activité, l’expression de la Création de Dieu, qui passe au travers de nous pour parfaire celle-ci.

Bien des malheurs ne nous attendraient pas si nous étions des majeurs.

L’Église, à cause d’une certaine tradition, reste la Dame dont, pour les meilleurs, le mystère demeure caché. Mais les autres ne connaissent son efficacité que par sa vitalité exprimée dans l’élémentaire quotidien.

« On ne peut bâtir sa vie sur quelqu’un, à la rigueur en faveur de quelqu’un. »

Donner sans savoir recevoir et recevoir sans regarder.

L’Eglise perd pied dans le monde, chaque fois qu’elle perd le sens de sa source, du mystère, de la pensée, puisant dans le mystère de Dieu.

Ce qui est légitime, ce n’est pas une liberté de conscience, mais la liberté de la conscience.

Un fils a besoin de la sagesse de son Père pour devenir un homme.
La tendresse d’une mère est toujours acquise ; la force très douce d’un père ne l’est pas nécessairement. En occident, on croit avoir tout donné quand on a donné de la nourriture et les études. C’est faux. J’ai besoin de mon père et mon fils a besoin de mes paroles comme d’une nourriture saine.
Il se nourrit de la vie familiale, et plus encore de la vie conjugale.

« La fin profonde du mariage est d’unir deux solitudes, c’est-à-dire, deux recherches. »

On peut tout apprendre, mais on ne connaît que ce que l’on aime. Aimer n’est pas une source de connaissance c’est un climat.

La vrai fidélité consiste à faire renaître en germe d’éternité ce que l’infidélité rejette, et la fausse fidélité momifie.

La connaissance est un secret de l’Amour.

On parle intelligemment de ce qu’on ne vit pas. On parle « admirativement » de ce que l’on vit, car l’admiration c’est l’intelligence mise en émoi par l’amour ou l’amitié.

La fidélité est un regard tourné vers l’autre ; la nuit n’a rien à y faire.

La fidélité vraie implique un échange vivant : elle est renouvellement, renaissance continue, route vers quelqu’un en son mystère.

La fidélité c’est savoir garder sa puissance d’accueil au-delà de sa sensibilité.

 

La meilleure forme de fidélité est celle qui nous aide à mûrir.

La fidélité ne crée pas l’amour, mais l’amour crée la fidélité.

Faire rentrer l’autre dans l’intimité d’une détresse est la plus grande preuve d’amitié, car elle montre notre faiblesse vécue.

L’épreuve mesure et rectifie l’amitié.

Éternelle L’amitié s’enracine dans l’Eternité de Dieu. Elle ne connaît ni mesure, ni transformation. Elle est un aspect de cette rencontre qu’à le Père, dans son extase qui est le Fils.

Toute joie possessive est semence de douleurs.

Pour des fiancés : regarder, admirer, protéger.

Le drame de l’Amour est de vouloir tenir dans ses mains ce qu’on ne connaît qu’avec son cœur déchiré et les yeux baissés.

Quand on aime, on ne sait ni se justifier, ni reprocher ; porteur d’un don sacré on est vulnérable.

Abordé comme un étranger, tu tiens ton secret.
Abordé comme un ami, tu livres ton message.
C’est vrai pour toute vie.

Nous avons tous besoin de nous sentir anoblis, dans ceux que nous aimons.

Aimer c’est donner, et donner c’est se perdre.

Aimer, ce n’est pas vouloir dilater les limites des autres, mais creuser en profondeur dans l’intériorité de leurs limites.

Aimer, ce n’est pas éprouver un grand sentiment, mais un grand dénuement en face de celui que l’on aime.

L’amour humain, rien qu’humain est une atroce illusion.

Si je n’aimais en toi ce plus que toi que j’aime par toi, il y a longtemps que nos routes se seraient séparées.

Aimer d’un amour universel, une chose ou un être fini, c’est aimer comme Dieu, c’est veiller comme le soleil sur une plante infime : elle est entourée comme si elle était seule, et chacun peut en dire autant. Seul l’amour paternel, l’amitié dans l’ordre humain peut connaître cette distance et cette intimité.

L’amour est le fruit d’une longue patience, plus qu’un fruit savoureux à portée de la main.

C’est dans l’Amour seul que le mystère peut s’ouvrir, et le mystère découvert demeurer à l’abri.

Tant que l’on n’aime pas d’un amour universel, on se débat dans la viscosité de possession.

Que l’amour transcende la morale c’est évident, mais l’Amour ne méprise pas ce geste ; mort ce geste est un appel, une rédemption.... Quand tout est triste, morne, froid, quand le cœur est vide, nos gestes extérieurs.
Ce geste est cri et témoignage.

Pourquoi existe-t-il des êtres dont les yeux sont remplis de lumière invisible ? Leur parole et leurs gestes suscitent une vie, une délivrance. Le silence est leur chant. Le recueillement, leur compagnon fidèle. L’admiration, leur secret. Ils sont fidèles à un amour du Roy.

L’amour cherche sa plénitude dans le don en s’intériorisant à l’être aimé ; dans le service par la gratuité du geste. Il est toujours en chemin.

Je suis affamé de tout le pain que je mange seul, pauvre de tous les biens que je ne donne pas. Quel doit être le tourment de Dieu s’Il nous aime ainsi.... Il agonise sous le poids de cet infini d’amour que je refuse.

Il y a de quoi méditer en ce monde car dans l’autre monde nous aurons franchi la Porte et ce sera le face à face sans voile. Il n’y aura plus les articulations sans fin, les signes de l’être, il y aura tout en lui, et lui sera tout.

La vie purifiée apaise, elle est porte sur l’éternité, joie sur le monde, douceur sur le mal. Elle est relation à l’égard de Dieu, elle est chant, offrande : elle est devenue messe.

Que ta douleur te soit une parole intérieure.

Il faut avoir connu les limites du désespoir pour accepter la lumière et la présence de Dieu.

Pour peu qu’un homme réfléchisse, il a honte de sa sécurité et il tremble de se voir un jour cloué devant la souffrance sans pouvoir se protéger contre l’amoindrissement ou l’affaiblissement. Qu’il se souvienne de Celui qui fut sans rien, et sans défense, devant la nuit.

Si tu mets tous le bien sur cette terre, tu resteras sans défense contre la mort.

La mort est devenue un voile et un autre visage de l’Amour.

Sur le chemin qui conduit à la liberté, la mort est la plus haute fête...

Moîse mourut dans un baiser de
DIEU

PRIERE

Seigneur, Père de ce monde qui est l’éblouissement de notre joie, accordez-moi la grâce d’être présent humblement à chaque être, vivant avec lui sous la minute d’Éternité que vous nous accordez.

 

Donnez-moi la grâce de le laisser partir sans inquiétude, et de le confier à Votre Sagesse.

 

Pour les autres, donnez la force du roc, la douceur de la rosée, la fidélité de la Vierge, et la clarté,du vitrail – AMEN
MIECK


 


 


 


 


 


 


 


 

(première version)

CHALON, 2 février 1963

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 08/02/2020

Questions / Réponses

Aucune question. Soyez le premier à poser une question.
Anti-spam